Berazachussetts

Leandro Àvalos Blacha

Asphalte

  • Conseillé par
    14 décembre 2011

    Berezina argentina !

    Berezina argentina !
    Je poursuis ma découverte de la littérature argentine contemporaine, grâce encore une fois à un livre des éditions Asphalte. Encore bien évidemment à un auteur qui m'est absolument inconnu ! La quatrième de couverture semble indiquer que nous sommes loin d'une littérature très classique, et pour moi c'est tant mieux.
    Quatre amies Dora, Milka, Beatriz et Susana découvrent une femme à moitié nue sur le bord de la route. Celle-ci, une zombie obèse aux nichons gros comme des ballons de baskets, se nomme Trash, laquelle a connu son heure de gloire quelque temps auparavant en interprétant des reprises d'abats (non Abba, pas abats, quoique ) en version gothique ! Bref elles amènent cette vision cauchemardesque chez l'une d'elles ! Et à partir de ce moment, l'apocalypse entre dans leurs vies !


    Susana part faire des courses, mais revient avec un cadavre sur les bras.... pour le plus grand bonheur de Trash, qui prend un en-cas et prépare quelques morceaux pour le congélateur....Direction le restaurant où notre zombie préférée a une altercation avec Saavedra, notable du coin, Dora « en mâle » de câlins lui prodigue des soins personnalisés....sur les bords de mer, Trash empêche un viol, mais ne peut empêcher la mort de Susana...des voyous, fils de bonne famille rôdent filmant certains méfaits qu'ils encouragent.
    Au matin le monde est le même pour certains mais a changé pour d'autres. L’amitié entre les trois femmes n'aura pas survécu aux obsèques de Susana, comme si la présence de Trash avait bouleversé les relations entre elles !
    En route pour des aventures pour le moins improbables, Trash part avec Beatriz en stop, Dora aménage la villa de son protecteur richissime et influent, pendant que Milka dévaste son appartement mais lui lègue une statue qui vaut son pesant d'or....
    Un road movie infernal et déjanté commence alors...avec une galerie de portraits assez hallucinants et hallucinés !
    Trash, la goulue de service est sûrement le personnage la plus sympathique de ce livre, d'ailleurs Beatriz ne s'y trompe pas quand elle dit que le geste le plus courtois qu'elle ait vu depuis longtemps est Trash donnant à boire à un chat errant. La condition de zombie n'est pas forcément agréable et il faut bien faire attention qui on mange....une maladie est si vite attrapée !
    Susana par exemple, et c'est dommage est née sous une mauvaise étoile : elle arrive enfin à se débarrasser du fantôme de son défunt mari dans des circonstances rocambolesques, en tuant un homme qui avait soi-disant pris possession de l'âme de son mari, mais qui en réalité ne cherchaient qu'à prendre possession de son propre corps à elle ! Le bonheur, enfin me direz-vous, eh bien non, le soir même sur sa route elle rencontre un violeur novice et contraint et un violeur récidiviste qui lui n'est pas contrit du tout. Elle sera violée et tuée !
    Autre personnage pour qui on aimerait avoir un peu de sympathie est Periquita, chef de gang en fauteuil roulant....mais elle de son côté est plutôt du genre, c'est moi le chef ! Elle a sa statue sur la place car il semble que beaucoup de gens la craigne ! Et en plus elle est jalouse comme un tigre !
    Dora, elle, n'a pas de scrupules, un homme riche suffit à son bonheur physique autant que matériel,un politicien local Saavedra, très couleur locale d'ailleurs, richissime et corrompu, avec un passé pas très net fera très bien l'affaire. Craignant pour sa vie, il remplit son étang de crocodiles et son jardin de tigres du Bengale. Ce qui ne l'empêche pas de batifoler avec Dora, tigresse d'alcôve dont on ne sait pas si elle porte des slips léopard. Nourrie aux journaux people, genre paparazzi, elle traîne toujours avec elle son appareil photo, et elle est également toujours prête à sacrifier son corps !
    Donc tout va bien pour eux dans le meilleur des mondes, mais dans l'ombre, une revenante Samy et son amant vont-ils troubler la vie de nos tourtereaux ?.... Les fils de familles bourgeoises se conduisant comme des enfants trop gâtés, leurs distractions sont humiliantes pour leurs victimes, surs de l’immunité que la situation de leurs géniteurs leur confère ! Une mémé à chats qui les déteste et ils le lui rendent bien, ces charmantes bestioles !
    On devine vite que l'auteur nous fait une critique sévère de la société argentine ! Le vampirisme de Trash n'est que le reflet d'une caste s'enrichissant de plus en plus au détriment du reste de la population. Caste corrompue sans foi ni loi ne connaissant que le profit et le pouvoir de l'argent roi.
    Plein d'humour et de dérision malgré tout dans ce livre. Je ne résiste pas à vous donner quelques noms de lieux savants, mélange de plusieurs pays et langues : Quitiliechtenstein, Pehuahollywood, Tchernobyllinghurst et bien sûr Berazachussetts. Un livre décalé et désenchanté qui dépeint une Argentine loin des clichés habituels!
    Et j'ai appris avec stupéfaction que même au ciel il y a des boutiques de luxe....pauvres riches !